« Comment peut-on vendre ou acheter le ciel, la chaleur de la terre? Cela nous semble étrange. Si la fraîcheur de l’air et le murmure de l’eau ne nous appartiennent pas, comment peut-on les vendre ? Pour mon peuple, il n’y a pas un coin de cette terre qui ne soit sacré. Une aiguille de pin qui scintille, un rivage sablonneux, une brume légère, tout est saint aux yeux et dans la mémoire de mon peuple. »
Chef indien Seattle, 1854
Être ou avoir ?
Peut-on trouver un sens à sa vie dans une société fondée sur le « toujours plus », le matérialisme et le rationalisme à outrance, l’hypertechnologie et la surconsommation ? Une telle civilisation de l’ « avoir » implique nécessairement l’insatisfaction perpétuelle et la peur du manque. Basée sur l’idéologie du « chacun pour soi », elle entraîne la compétition entre les êtres humains, l’individualisme, la solitude subie, voire l’exclusion. Au contraire, une société qui met en avant les valeurs de l’ « être » se soucie du bien-être et de l’accomplissement de chacun dans le respect et la complémentarité avec son voisin. Elle porte les valeurs de l’amour et de la solidarité et exalte la créativité et les potentialités de l’être humain au service du bien commun.
Le sentiment d’être relié
Retrouver le sens du sacré, ce n’est pas prôner l’adhésion à telle ou telle religion. C’est retrouver au plus profond de nous-même l’essence commune à toutes les religions, dans leur sens premier, celui de « relier ». Se sentir relié au Tout, c’est être conscient que l’on ne peut exister sans la nature, la terre, la nourriture qu’elle nous procure, l’air, la lumière, les autres êtres vivants. Dans la modernité, nos relations et nos organisations sont fondées sur l’antagonisme, la division, la compétition. La réussite de l’un se fait au dépend de l’autre. Or, l’autre appartient à l’humanité et à la nature dont nous faisons nous-même partie. Et tout ce que nous lui faisons de mal, c’est à nous-mêmes que nous l’infligeons. Dans une société évoluée et éveillée aux valeurs de l’être, respecter l’autre comme soi-même devrait donc être un principe fondamental.
Agir pour le bien commun
Retrouver le sens du sacré, c’est honorer la vie qui nous est confiée, la vie en nous et autour de nous. Nous posons-nous souvent la question de savoir à quoi nous employons notre énergie et notre temps ? Est-ce à la maladie du monde ou à la guérison du monde ? Agir pour le bien commun, c’est veiller à ce que chacun de nos actes ne nuise à la nature, ni à ses ressources, ni à ses êtres vivants. C’est faire les choses en conscience afin que nos activités d’aujourd’hui ne compromettent l’avenir. C’est porter les valeurs de la tolérance, de l’entraide et de la coopération. C’est abolir le « chacun pour soi » pour exalter la puissance de la solidarité. Malgré la difficulté apparente de sortir du système compétitif mondialisé dans lequel nous sommes actuellement, nous avons tous le pouvoir de choisir notre manière de participer au monde.
Être pleinement présent
Retrouver le sens du sacré, c’est être pleinement présent à chaque instant que nous vivons. Dans la société d’aujourd’hui, il est difficile de ne pas se laisser accabler par nos charges professionnelles, financières, sociales, affectives, etc. et par tous les doutes et les peurs qu’elles provoquent. Être pleinement présent requiert de se protéger du tohu-bohu de l’existence, construire sa structure intérieure et savoir puiser en soi la force, la paix et la confiance nécessaires pour éclairer nos actes. A quoi bon regretter le passé ou s’angoisser pour le futur alors que tous les instants de notre vie ne se sont jamais déroulés qu’au présent ? N’attendons donc pas demain pour nous mettre en marche vers un monde meilleur. La conscience de l’impermanence des choses devrait nous permettre de nous centrer sur l’essentiel.
Se connaître et s’aimer soi-même
Retrouver le sens du sacré, c’est apprendre à se connaître soi-même pour pouvoir cheminer vers notre accomplissement intérieur et participer à un monde meilleur. Nous ne pouvons prétendre changer les vices de la société sans commencer par se regarder soi-même tel que l’on est et par entreprendre un travail personnel. Avec honnêteté, sincérité et douceur, acceptons de voir nos parts d’ombre et cherchons l’origine de nos souffrances dans nos propres actes, pensées et modes de vie. Cessons de projeter la cause de nos tourments sur l’autre et sortons de la victimisation pour entrer dans la responsabilisation de notre existence. Mettons en lumière nos mécanismes inconscients qui souvent nous aveuglent, nous empêchent de nous réaliser pleinement et de donner le meilleur de nous-mêmes. Ainsi, pourrons-nous déposer nos défenses, éveiller l’amour de soi-même pour enfin aimer les autres et la vie.
Comment faire ?
Retrouver le sens du sacré, ce n’est pas rechercher le surnaturel. Cela peut s’incarner dans des actes simples et quotidiens :
- Se poser la question du sens de nos actes, de notre travail et tenter tant que possible de les accorder avec nos valeurs profondes ;
- Sortir de la frénésie d’une vie « à cent à l’heure » et s’autoriser des temps de détente, de repos, de respiration profonde ;
- Prendre des moments seuls à méditer afin de chasser les peurs et les doutes de notre mental et de retrouver la paix intérieure ;
- Passer du temps dans la nature, à l’observer et à se sentir relié à elle, à tous ses éléments ;
- Aborder la relation à l’autre avec sincérité, tolérance et ouverture, chacun ayant son travail à faire sur lui-même ;
- Chanter, danser, s’amuser, rire et honorer ainsi la vie au quotidien ;
- Pratiquer la pensée positive (s’efforcer à voir les aspects positifs des choses) afin de garder confiance quels que soient les évènements que nous traversons. Celle-ci est souvent créative et pourrait bien nous surprendre !
Texte écrit pour le Mouvement Colibris.
Par Claire Eggermont, co-fondatrice.
http://www.colibris-lemouvement.org/
Sources : Le sens du sacré, Questions de – Albin Michel